| L'église

Deux paroisses coexistaient sur l’actuel territoire de la commune de Saint-Julien Beychevelle : Saint-Julien et Saint-Mambert (aujourd’hui sur la commune de Pauillac). L’église de Saint-Julien a été construite par l’architecte Auguste Bordes en1847-1848). Elle remplace une église à l’état défectueux, et trop petite, la population augmentant de jour en jour (1600 âmes à cette époque). Cette dernière avait toutefois fait l’objet de nombreux travaux : construction d’un clocher (1825), réparations de ce même clocher (1844).

 

L’église de Saint-Julien Beychevelle est donc construite au XIXème siècle de style néo gothique avec de nombreux pinacles et ornements.

 

Extraits ouvrage Auguste Bordes , architecte Histoire des monuments de Bordeaux et de la Gironde :

 

« L’ancienne église de Saint-Julien de Reynac, malgré les réparations dont elle avait été l’objet, n’offrait aucun intérêt d’art : son état défectueux contrastait avec la prééminence qu’exerce au nom de cette commune la qualité supérieure des vins qu’on y récolte.

 

La construction dont nous parlons, était peu susceptible de satisfaire les conditions de goût, les convenances de position et le sentiment de grandeur et de fortune des principaux habitants de ce pays ; il devenait donc utile de faire cesser cette incohérence, et en améliorant la localité, sacrifier à cette loi de la nature et à ce besoin social, qui excite vers la perfectibilité. Le projet de la réédification de l’église étant décidé, monseigneur l’archevêque insista pour le genre gothique, sous l’inspiration duquel j’avais composé les plans (…). Mais il fallut bientôt s’élever contre les difficultés suscitées par le premier fonctionnaire du département,… contre celles imaginées par le conseil des bâtiments civils… Il fallut déjouer les basses intrigues et les tentatives de déception auxquelles se prêtèrent plusieurs administrateurs et architectes de Paris !... Ces circonstances faillirent compromettre le succès de l’œuvre préparée ; mais l’attitude de la municipalité, les bonnes dispositions de M. Duchatel (le Comte Duchatel était propriétaire de Lagrange et ministre de l’intérieur), le bienveillant appui de M. Guestier (maire), le zèle de M. Ménard (curé), celui non moins actif et non moins dévoué du colonel Bontemps-Dubarry, de MM Duluc, de Las-Case, Barton, de Pichon, etc., etc., triomphèrent de toutes les résistances bureaucratiques et assurèrent définitivement l’exécution de mon projet.

A l’extérieur, les frontons, les corniches et couronnements dentelés, les pyramides, les flèches polygonales etc…, expriment aussi, d’une manière technique, les formes et les moyens usités à l’époque du Moyen Age.

 

Les travaux confiés à l’entrepreneur Pascal Mascarros ont été commencés en juin 1847 et terminés en 1848.

La longueur totale de l’église est de 40 mètres, sa largeur de 15 mètres.

Sa hauteur de 12 mètres.

La hauteur du clocher est de 20 m 50.

Celle de la flèche de 20 m 30.

Ensemble 40 mètres 70 c.

Eloigné de Pauillac de 4 kilomètres, de Blaye de 8 kilomètres, l’on aperçoit de ces deux villes le clocher élevé de cet édifice, d’où l’œil découvre un immense horizon, et vers le nord-est, la surface indéfinie de la Gironde, dont les rives sont distances de plus de 8 kilomètres. »

Le plan de la nouvelle église de Saint-Julien comprend la division d’un porche, celle du baptistère et du dépôt des chaises ; il renferme une nef, deux bas-côtés, une croisière avec chapelles, un sanctuaire principal avec allées au pourtour, deux sacristies, etc. L’élévation se distingue à l’intérieur par des colonilles à chapiteaux historiés, par des nervures, des guimberges, des croisées ogivales et trinômes, des rosaces ramifiées et par tous les détails sympathiques du mode gothique aux XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.

Le 28 mai 1847, il est organisé une souscription :

 

« Nous soussignés propriétaires de a commune de Saint-Julien et membres de la fabrique de l’église, convaincus que la restauration projetée de l’église ne répondra pas au vœu général, puisqu’assise sur ses anciens fondements, elle ne s’harmonisera pas avec la place, qu’elle conservera son clocher déjà en mauvais état de mauvais goût, qu’elle blessera à toujours l’œil de l’observateur et que dans l’avenir on aura infailliblement du regret de ne l’avoir pas reconstruite entièrement (…) . » Cette souscription a été bien accueillie et a donné les meilleurs résultats.

 

Emplacement de l’église et déroulement de la construction : L’église est située sur une plateforme qui rattrape la dénivellation naturelle du terrain : si la façade occidentale est de plain-pied avec la place Saint-Pierre, la partie orientale de l’édifice est installée sur un niveau de soutènement délimité par un mur de moellons ‘au sud et à l’est). En effet, la commune a déjà fait reconstruire il y a peu d’années, le presbytère et elle vient de faire bâtir un édifice qui n’est même pas encore achevé et doit servir de salle d’asile et de mairie. La nouvelle construction ne doit pas masquer le presbytère sur ordre de « Paris ». De plus, le but est d’avoir plus de places à l’intérieur. Paris propose du byzantin et refuse le gothique. Le maire de l’époque est désespéré : « seul le style gothique rendra notre église digne d’une commune que la richesse de ses produits et ses nombreux châteaux placent au premier rang des communes rurales de France » (1845). Le ministre de l’époque au château Lagrange fera le nécessaire pour faire accepter les plans.

Pour Henri Martin Maire de 1947 à 1989 :

 

« Tous les grands domaines avaient pour propriétaires des ducs, marquis, comtes, barons, pairs de France, Présidents de parlement etc… On retrouve dans tous les documents relatifs aux constructions des églises un véritable armorial des propriétaires successifs des vignobles de Saint-Julien. Comme nous le savons l’ancienne église a été démolie à partir du 13 mai 1847, le cimetière déplacé (sous le parvis devant l’église il reste des vestiges, des ossements de l’ancien cimetière). La pose de la première pierre de la nouvelle église a eu lieu le 25 septembre 1847 par l’archevêque de Bordeaux.

 

La consécration eut lieu le 14 septembre 1848 par monseigneur Donnet archevêque de Bordeaux accompagné de monseigneur Gignoux évêque de Beauvais. Pour la précision de l’histoire sachez que la nouvelle église avait coûté 91000 francs !! L’aménagement intérieur fût assuré grâce à la générosité des propriétaires de Saint-Julien et de Saint-Lambert (ex Saint-Mambert) ce qui montre bien que les habitudes prises d’une seule et même paroisse continuaient normalement après le découpage communal de la Gironde du 15 mai 1826.